Dans la nuit du 3 au 4 juillet 2025, Kyiv, la capitale ukrainienne, a été la cible d’une attaque aérienne massive orchestrée par la Russie. Selon l’état-major ukrainien, 539 drones, dont 477 Shahed de conception iranienne, et 11 missiles, incluant des Iskander-M et un Kinzhal hypersonique, ont été lancés, marquant l’assaut le plus intense depuis le début du conflit en février 2022. Cette offensive, qui a fait au moins 19 à 23 blessés, endommagé des infrastructures civiles et ferroviaires, et embrasé six des dix districts de la ville, est survenue quelques heures seulement après un appel téléphonique entre le président américain Donald Trump et son homologue russe Vladimir Poutine, qui n’a abouti à aucun progrès vers un cessez-le-feu.
Une offensive calculée : la tactique russe de la saturation
L’attaque du 4 juillet illustre l’évolution des stratégies militaires russes vers une guerre d’usure sophistiquée. Les 539 drones déployés comprenaient des Shahed-136 (ou Geran-2), des drones kamikazes à bas coût désormais équipés de sous-munitions pour maximiser les dégâts, ainsi que des drones leurres destinés à saturer les systèmes de défense antiaérienne ukrainiens. Ces derniers, peints en noir pour compliquer leur détection nocturne, ont forcé les unités ukrainiennes à multiplier les tirs, épuisant leurs stocks de munitions coûteuses, comme les missiles Patriot. Les missiles Iskander-M et Kinzhal, à la précision accrue, ont visé des cibles stratégiques, notamment des infrastructures ferroviaires, essentielles à la logistique ukrainienne.
Selon un rapport du Center for Strategic and International Studies (CSIS), la Russie a intensifié sa production de drones et de missiles, avec une augmentation de 66 % de ses capacités depuis 2023, permettant des frappes de cette ampleur.
L’objectif est clair : surcharger les défenses ukrainiennes, provoquer des dégâts matériels et psychologiques, et éroder la résilience de la population civile. Les témoignages de journalistes de l’Associated Press à Kyiv décrivent une nuit rythmée par le bourdonnement incessant des drones, des explosions et des tirs nourris des défenses antiaériennes, créant un climat de terreur.
Les impacts sur Kyiv : une population sous pression
L’attaque a causé des dégâts significatifs dans six des dix districts de Kyiv, touchant des zones résidentielles et les infrastructures ferroviaires, selon le maire Vitali Klitschko. Sur les 23 blessés, 14 ont été hospitalisés, bien que le bilan humain reste limité par rapport à l’ampleur de l’assaut. Les débris des drones abattus, tombés sur 33 sites, ont provoqué des incendies dans des immeubles et des cours, aggravant les dommages collatéraux. L’opérateur ferroviaire ukrainien Ukrzaliznytsia a signalé des perturbations majeures, avec des trains détournés et des retards importants.
Des vidéos partagées sur les réseaux sociaux montrent des habitants courant vers des abris, des pompiers luttant contre des flammes dans l’obscurité, et des bâtiments éventrés. Un résident de Kyiv, cité par Reuters, témoigne : « On ne dort plus. Chaque nuit, on attend les sirènes, on descend dans les abris. C’est épuisant, mais on n’a pas le choix. »
Cette stratégie de frappes nocturnes répétées vise à briser le moral de la population, un objectif que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a qualifié de « terreur et meurtre ».
Violations du droit international : une responsabilité contestée
Les frappes sur des zones résidentielles et des infrastructures civiles soulèvent des questions sur le respect des Conventions de Genève, qui exigent une distinction claire entre cibles militaires et civiles. Selon un rapport de l’ONU, les attaques russes ont causé une augmentation de 50 % des victimes civiles en Ukraine au premier semestre 2025, avec 13 134 morts et 31 867 blessés confirmés depuis février 2022. Amnesty International a dénoncé des « attaques indiscriminées » dans des rapports récents, pointant du doigt des frappes sur des hôpitaux et des écoles comme des violations potentielles du droit humanitaire international.
Cependant, la Russie nie systématiquement cibler des civils, affirmant que ses frappes visent des infrastructures stratégiques utilisées à des fins militaires. Dans un communiqué relayé par Pravda, le Kremlin soutient que les attaques de Kyiv visaient des cibles liées à l’effort de guerre ukrainien.
Les failles de la défense ukrainienne : une dépendance critique
L’Ukraine a réussi à abattre 270 drones et deux missiles de croisière, tandis que 208 autres cibles ont été neutralisées par brouillage électronique, selon l’armée de l’air ukrainienne. Cependant, neuf missiles et 63 drones ont atteint leurs cibles, révélant les limites des systèmes antiaériens ukrainiens. Les missiles Patriot, essentiels pour intercepter les projectiles balistiques, sont coûteux (environ 4 millions de dollars par unité) et en quantité limitée, surtout après la récente suspension de certaines livraisons américaines. Un officier ukrainien, cité par The Guardian, a souligné que la peinture noire des drones Shahed complique leur détection nocturne, augmentant la pression sur les opérateurs.

Pour pallier ces failles, l’Ukraine développe ses propres solutions pour produire des drones intercepteurs. Cependant, la dépendance aux systèmes occidentaux, notamment les Patriot et NASAMS, reste un point faible. Selon l’Institut Kiel, les engagements militaires occidentaux envers l’Ukraine ont diminué depuis 2023, une tendance aggravée par la pause récente des livraisons américaines décidée par l’administration Trump.
L’échec du dialogue Trump-Poutine
L’attaque intervient dans un contexte diplomatique tendu. Le 3 juillet, Donald Trump a discuté pendant près d’une heure avec Vladimir Poutine, espérant avancer vers un cessez-le-feu. Selon Trump, cité par Reuters, l’appel n’a « abouti à aucun progrès » : « Je suis très déçu. Poutine ne semble pas prêt à arrêter ». Le Kremlin, par la voix de Yuri Ushakov, a réaffirmé que la Russie poursuivrait ses objectifs, notamment le contrôle des territoires revendiqués et l’opposition à l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN.
Cette absence de progrès diplomatique coïncide avec une décision controversée de l’administration Trump de suspendre certaines livraisons d’armes à l’Ukraine, notamment des missiles Patriot et des obus guidés. Trump a justifié cette pause en déclarant que les États-Unis avaient « vidé leurs stocks » sous l’administration Biden, une affirmation contestée par des analystes militaires qui pointent une volonté de réévaluer la stratégie américaine. Volodymyr Zelensky, qui devait s’entretenir avec Trump le 4 juillet, a insisté sur l’urgence de reprendre les livraisons pour contrer les attaques russes.
Une guerre d’usure aux implications globales
L’attaque du 4 juillet s’inscrit dans une intensification des frappes russes, avec plus de 330 missiles et 5 000 drones lancés en juin 2025, selon le ministère ukrainien des Affaires étrangères. Cette stratégie vise à épuiser les ressources ukrainiennes tout en testant la détermination de ses alliés. La Russie exploite les divisions occidentales, notamment la réticence croissante de certains pays à financer une guerre prolongée. En parallèle, l’Ukraine continue de mener des contre-attaques, comme une frappe de drone sur une usine à Izhevsk, à 700 km du front, démontrant sa capacité à frapper en profondeur.
Cependant, ni la Russie ni l’Ukraine ne semblent prêtes à des concessions majeures. Poutine maintient que la paix passe par la reconnaissance des gains territoriaux russes, tandis que Kyiv rejette toute négociation impliquant une perte de souveraineté. Cette impasse prolonge une guerre qui a déjà coûté un million de vies selon le Wall Street Journal.
Un cycle de violence sans issue ?
L’attaque massive sur Kyiv révèle la brutalité d’une guerre d’usure où les civils paient un lourd tribut. Les tactiques russes, combinant drones bon marché et missiles de précision, exploitent les failles ukrainiennes tout en défiant les normes internationales. L’échec des pourparlers Trump-Poutine et la suspension des livraisons d’armes américaines soulignent les limites du dialogue face à des objectifs stratégiques inconciliables.